Antidote au culte de la performance

La Robustesse du vivant
Olivier Hamant
Tracts, Gallimard, août 2023
Destruction sociale, p 8
Comme le décrypte Sandra Lucbert dans le ministère des contes publics : la réduction des impôts génère l'approbation des électeurs mais profite d'abord aux plus riches ; cela accroît le déficit du secteur public ; l'injonction de réduction de la dépense publique suit ; le marché prend possession des services publics et les soumet à l'injonction de rentabilité. Le gouvernement technocratique agite le défaut de paiement comme une menace, alors qu'au fond, c'est son programme.
p 9
Les 500 plus grandes fortunes françaises ont multiplié par 5 la valeur de leur patrimoine entre 2000 et 2021, passant de 8 % à 40 % du PIB national. Nous ne pourrons pas vivre dix années supplémentaires à ce rythme.
Guerres, p 11
Quand les pays pauvres sont en guerre, en général un pays riche sponsorise l'effort de guerre indirectement.
L'adaptation : un futur obsolète, p 17
Efficacité et efficience sont les instruments d'une optimisation qui nous enferre dans une voie étriquée, et donc inadéquate si tout change tout le temps. C'est aussi le monde périmé de l'adaptation, où nous prétendions connaître l'avenir.
Dans un monde turbulent, il nous faudra basculer de l'adaptation à l'adaptabilité.
On ne peut pas être à la fois très adapté et très adaptable. Quand on est très adapté [...] on a dû renoncer à certaines compétences jugées inutiles. Au contraire, quand on est très adaptable, [...] de nombreuses ressources sont utilisées pour maintenir des compétences [...] potentiellement utiles à [long] terme.
Le jeu de clés du vivant, p 19
Penser le vivant comme un système optimisé en dit long sur notre obsession de l'efficacité, mais ne dit rien du vivant. [...]
Darwin [...] disait que sont sélectionnés au cours de l'évolution les êtres avec des caractères satisfaisants. [...] On est loin de la sélection du plus adapté !
La robustesse avant la sobriété, p 24
Nous ne manquons pas de solutions ; nous avons surtout accès à trop de solutions contre-productives. [...] Le primat donné à la robustesse est pragmatique (faire face à un monde fluctuant), opérationnel (faire émerger la sobriété et la durabilité), et plus engageant (répondre à la volonté de durer plutôt qu'à la nécessité de réduire).
Produire pour nourrir les écosystèmes, p 28
Il s'agit de basculer des extractions aux interactions. Dans le monde de la robustesse, on n'exploite plus les écosystèmes pour augmenter la production ; c'est la production qui nourrit les écosystèmes.
Innover contre la performance, pp 32, 33
L'innovation de rupture n'est en général pas le produit des plus performants. [...] GPS, batteries, disque dur, reconnaissance vocale, écran tactile et Internet sont toutes des innovations du secteur public financées par l'impôt.
Recarbonner l'économie, p 35
La bioéconomie en devenir va ouvrir un infini de solutions ciculaires, mais elle va aussi demander du temps : les bactéries, les champignons ou les plantes devront fabriquer la biomasse nécessaire, à leur rythme et sans menacer les besoins essentiels des écosystèmes et des humains.
Faire commun : relier grâce à des contradictions, p 37
Le rôle stabilisateur des contradictions est un fondement de la société démocratique robuste.
Travailler moins pour vivre mieux, p 38
En Grande-Bretagne, il a été calculé qu'il ne faudrait pas travailler plus de neuf heures par semaine si nous voulions rester en dessous d'un réchauffementclimatique de +2°C.
p 39
Côté travail, la fuite des ultra-riches, dont le pouvoir d'innovation est souvent fantasmé et l'impact écologique sous-estimé, ne sera pas une grosse perte.
Conclusion, p 60
Les militaires sont des professionnels du monde fluctuant et ont généralement une excellente maîtrise de l'équilibre à trouver entre performance et robustesse.

Biologie, anthropologie, politique