Les mots et les choses

Michel Foucault, 1966
Tel, Gallimard

I

Préface

p. 7-8
Dans l'émerveillement de cette taxinomie [Borgès], ce qu'on rejoint d'un bond, ce qui, à la faveur de l'apologue, nous est indiqué comme le charme exotique d'une autre pensée, c'est la limite de la nôtre : l'impossibilité nue de penser cela.

[...] Où peuvent-ils se juxtaposer sinon dans le non-lieu du langage ?

p. 15

L'histoire de la folie serait l'histoire de l'Autre [...] ; l'histoire de l'ordre des choses serait l'histoire du Même [...]

Chapitre III : Représenter

I. Don Quichotte

p. 61

L'exploit doit être preuve : il consiste non pas à triompher réellement
—c'est pourquoi la victoire n'importe pas au fond—, mais à transformer la réalité en signe. En signe que les signes du langage sont bien conformes aux choses elles-mêmes. Don Quichotte lit le monde pour démontrer les livres.

Tout son chemin est une quête aux similitudes : les moindres analogies sont sollicitées comme des signes assoupis [...]

p. 62

Le langage pourtant n'est pas devenu tout à fait impuissant. Il détient désormais de nouveaux pouvoirs, et qui lui sont propres. Dans la deuxième partie du roman, Don Quichotte rencontre des personnages qui ont lu la première partie du texte et qui le reconnaissent, lui, homme réel, pour le héros du livre. Le texte de Cervantes se replie sur lui-méme [...]

p. 64

Entre eux [le fou et le poète] s'est ouvert l'espace d'un savoir où, par une rupture essentielle dans le monde occidental, il ne sera plus question des similitudes, mais des identités et des différences.

II. L'ordre

p. 66
Il existe deux formes de comparaison, et il n'en existe que deux : la comparaison de la mesure et celle de l'ordre.

Chapitre V : Classer

III. La structure

p. 144

L'observation, à partir du XVIIe siècle, est une connaissance sensible assortie de conditions systématiquement négatives.

VII Le discours de la nature

p. 170
La théorie de l'histoire naturelle n'est pas dissociable de celle du langage.

Chapitre VI : Échanger

I. L'analyse des richesses

p. 178

En fait, les concepts de monnaie, de prix, de valeur, de circulation, de marché, n'ont pas été pensés, au XVIIe et au XVIIIe siècle, à partir d'un futur qui les attendait dans l'ombre, mais bien sur le sol d'une disposition épistémologique rigoureuse et générale.

IV. Le gage et le prix

p. 195

Law, avec ses partisans, ne s'oppose pas à son siècle comme le génial —ou imprudent— précurseur des monnaies fiduciaires. sur le même mode que ses adversaires, il définit la monnaie comme gage. Mais il pense que le fondement en sera mieux assuré (à la fois plus abondant et plus stable) par une marchandise extérieure à l'espèce monétaire elle-même ; ses adversaires, en revanche, pensent qu'il sera mieux assuré (plus certain et moins soumis aux spéculations) par la substance métallique qui constitue la réalité matérielle de la monnaie.

V. La formation de la valeur

p. 205

Former de la valeur, ce n'est donc pas satisfaire des besoins plus nombreux ; c'est sacrifier des biens pour en échanger d'autres. Les valeurs forment le négatif des biens.

II

Chapitre VII : Les limites de la représentation

V. Idéologie et critique

p. 250

À partir de cet événement, ce qui valorise les objets du désir, ce ne sont plus seulement les autres objects que le désir peut se représenter, mais un élément irréductible à cette représentation : le travail ; ce qui permet de caractériser un être naturel, ce ne sont plus les éléments qu'on peut analyser sur les représentations qu'on se fait de lui et des autres, c'est un certain rapport intérieur à cet être, et qu'on appelle son organisation ; ce qui permet de définir une langue, ce n'est pas la manière dont elle représente les représentations, mais une certaine architecture interne, une certaine manière de modifier les mots eux-mêmes selon la posture grammaticale qu'ils occupent les uns par rapport aux autres : c'est son système flexionnel.

Chapitre VIII : Travail, vie, Langage

I. Les nouvelles empiricités

p. 265

La constitution de ces modes fondamentaux, elle est sans doute enfouie loin dans l'épaisseur des couches archéologiques : on peut, cependant, en déceler quelques signes à travers les œuvres de Ricardo pour l'économie, de Cuvier pour la biologie, de Bopp pour la philologie.

Chapitre IX. L'homme et ses doubles

III. l'analytique de la finitude

p. 324
Dans la représentation, les êtres ne manifestent plus leur identité, mais le rapport extérieur qu'ils établissent à l'être humain.

Note 1 p. 339

[L]e moment kantien : c'est la découverte que le sujet, en tant qu'il est raisonnable, se donne à lui-même sa propre loi, qui est la loi universelle.

Chapitre X. Les sciences humaines

VI

p. 398
L'homme est une invention dont l'archéologie de notre pensée montre aisément la date récente. Et peut-être la fin prochaine.

Philosophie
Marc Girod