Pierre Cassou-Noguès
Figures du savoir - Les belles lettres, 2001
Excellent aperçu des mathématiques à l'aube de XXe siècle. Des références à Science et Méthode. À mettre en parallèle avec: Where Mathematics Comes From et La nouvelle alliance.
Introduction, p 14
Le programme de Hilbert est de justifier les raisonnements qui supposent un infini actuel au moyen d'autres raisonnements appartenant à la théorie de la démonstration et n'utilisant qu'un infini potentiel.
Königsberg et ailleurs : les mathématiques en Allemagne autour de 1880, p 24
Kronecker :
« Dieu a créé les nombres entiers, l'homme fait le reste. »
L'axiomatisation de la géométrie, p 43
Il est inutile de savoir qui est Socrate, ce que c'est qu'un homme ou ce que c'est que d'être mortel. Il suffit d'appliquer le schéma : si « Tout x est P » et si « a est un x », alors « a est P ».[Mais « ce qui est rare est cher », « un cheval bon marché est rare », donc « un cheval bon marché est cher »; ou « je mens toujours »]
p 44
Les axiomes ont deux fonctions : prémisses dans les démonstrations, définitions déguisées des notions.
En algèbre, il ne s'agissait que d'expliciter la structure de champs d'objets supposés connus, des nombres ou des invariants, alors que la méthode axiomatique cherche, en explicitant une structure, à définir un champ d'objets. Le but de l'abstraction n'est plus d'éclairer mais de recréer un champ d'objets.
Russell communique son paradoxe [sur l'ensemble des ensembles qui n'appartiennent pas à eux-mêmes] en 1902. Dans une lettre à Frege, de 1903, Hilbert affirme que Zermelo est arrivé au même résultat que Russell et que ce paradoxe est connu à Göttingen « depuis trois ou quatre ans ».
p 71
[Pour Frege] les termes, qui interviennent dans les axiomes, ont une référence et désignent des concepts. Ceux-ci sont antérieurs aux axiomes.
Hilbert s'en tient à sa position antérieure :
« J'ai toujours dit exactement l'inverse : si les axiomes arbitrairement posés avec toutes leurs conséquences ne se contredisent pas, alors ils sont vrais et les choses qu'ils définissent existent. C'est pour moi le critère de la vérité et de l'existence ».
La solution formaliste, qui est de fonder les mathématiques en les représentant dans des axiomatiques garanties par des démonstrations de non-contradiction, établirait un fondement pour les mathématiques au moyen d'un raisonnement mathématique.
p 80
Si l'on était convaincu qu'une définition donne existence à un objet, on refuserait une définition qui fait intervenir cet objet même qui doit être défini et, par là, engendré. Mais on croit qu'une définition a pour seule fonction de désigner un objet qui lui préexiste.
Russell accorde un statut particulier à trois axiomes, dans les Principia Mathematica, l'axiome de réductibilité, l'axiome du choix et l'axiome de l'infini.
p 85
Pour Hilbert [...] :
« La théorie des fondements de Russell et Whitehead [...] fait reposer les mathématiques sur l'axiome de l'infini et sur un axiome dit de réductibilité. Or ces deux axiomes sont d'authentiques hypothèses qui ne peuvent pas s'appuyer [...] sur une preuve de consistance [... et] dont la validité universelle reste même ouverte au doute ».
Du point de vue intuitionniste, qui exige une construction effective, le tiers exclu signifie la possibilité de démontrer ou de réfuter toute proposition, et par conséquent, équivaut à la résolubilité de tout problème mathématique.
p 115
La décidabilité signifie que les démonstrations à l'intérieur du système formel, sont mécaniques et réalisables par une machine [...]
p 116
Hilbert admet que la consistance prouve l'existence.